Si autrefois les régimes issus de coups d’Etat étaient, systématiquement, bannis ou marginalisés, aujourd’hui, l’approche est différente, car empreinte de pédagogie et fondée sur le compromis. On rappelle les principes et encourage à s’y soumettre sans exercer forcément le pouvoir de coercition habituel.
On évite d’entrer dans un bras de fer avec les militaires qui arrivent au pouvoir pour ne pas leur donner le prétexte de s’isoler, de se replier sur eux-mêmes et d’échapper ainsi à tout contrôle, à n’importe quelle exigence comme on le voit avec le Mali, le Burkina et le Niger qui se sont constitués en front de refus pour protester contre le train de sanctions, ayant suivi la rupture de l’ordre constitutionnel dans ces États. Dans le fond, l’on a trouvé le moyen dilatoire de se soustraire à la forte pression et à la vigilance accrue des partenaires. C’est pourquoi, même lorsque les États et institutions incriminés ont lâché du lest, il n’y a pas eu de progrès ni de bonne foi en guise de réciprocité de la part des dissidents qui, entre temps, se sont regroupés dans une alliance dénommée alliance des États du Sahel ( AES). Maintenant que le Mali, le Burkina et le Niger sont assurés d’exercer leur souveraineté, entendre, sont libres de penser et agir comme bon leur semble, par exemple, faire ou ne pas faire d’élections, céder le pouvoir ou le garder indéfiniment, ils se disent ouverts à la coopération toujours dans les limites de leurs voeux, agendas et objectifs propres. Certes, la posture souverainiste leur a permis de se libérer de toutes les contraintes majeures mais leurs populations vivent l’enfer de l’insécurité et d’une dégradation continue des conditions de vie, du pouvoir d’achat, en particulier. Elles ne peuvent pas vivre de slogans ni des oukases. Les chefs d’Etat, indépendantistes, eux-mêmes, ne dorment que d’un œil fermé, harcelés, de toutes parts.
Les populations sont toujours les premières à souffrir des mauvais choix des dirigeants et des sanctions internationales. C’est pourquoi, la CEDEAO qui en donne le ton et ouvre la voie pour les autres, suivant le principe de subsidiarité, n’y a recours que lorsqu’elle arrive à ses limites dans le dialogue et la négociation. Si non, ce n’est que de principe et de façade. C’est pourquoi d’ailleurs ce n’est jamais efficace. Sans compter la difficulté à s’accorder à l’interne et les interférences extérieures. Et comme l’institution sous-regionale qui doit être la pionnière a renoncé au bâton pour la carotte, il n’y a pas de raisons que d’autres institutions comme l’OIF n’en fasse pas autant en s’alignant sur la position sous-regionale. Peut-on être plus royaliste que le roi ?
Dans les faits, les sanctions ont vécu, mais les raisons qui les motivent: Démocratie, Droits de l’homme sont toujours opposées aux États et Chefs d’Etat. Il ne faut donc pas croire qu’il y a un exploit diplomatique ou un mérite à célébrer, c’est juste que les paradigmes ont changé, même si les exigences restent les mêmes pour tous qu’on soit dans la famille ou en dehors.
La Guinée comme aucun des pays où des coups d’Etat sont intervenus n’a été mise vraiment, depuis le début, sur le ban de la communauté internationale. Au contraire, les réactions ont été bienveillantes, les portes sont restées entrebaillées. Alors, lorsqu’on parle de levée de sanctions, c’est comme enfoncer une porte entrouverte.
Qu’on ne s’y trompe pas cependant. En fonction de l’évolution de la situation et du comportement des dirigeants, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, le discours peut changer, les positions varier. Rien n’est définitivement acquis. A ne surtout pas confondre un encouragement à bien faire et se compoter à un permis de tout faire et à ne rien s’interdire. La béatitude de l’autosatisfaction est aussi dangereuse que l’habitude chronique de flatter l’égo du chef afin de l’éloigner de l’essentiel et de le couper de la réalité. Le beau temps précéde toujours la tempête.
L’édito /lerevelateur224.com